Retour sur… faire tiers-lieu dans l’Yonne

Amélie ChapetRetour sur...Leave a Comment

Le jeudi 15 décembre se déroulait à Joigny (89) une soirée autour de la notion de « faire tiers-lieu ». Organisée en marge d’un atelier dédié à l’accompagnement des porteurs.euses de projets dans l’Yonne, elle a réuni près de 70 personnes d’horizons différents (élus, membres de collectifs, citoyens, curieux, etc.) ! A la différence des deux premières journées, organisées respectivement à Dijon et à Besançon, les organisateurs.rices (La Convergence des possibles, la Fabrique de Territoire du Puisaye-Forterre, la Fédération des Foyers Ruraux de l’Yonne et le Réseau des tiers-lieux de Bourgogne-Franche-Comté.) ont souhaité, cette fois-ci, organiser un événement plus léger, mêlant informatif et festif, ouvert à tous les habitants.

Pourquoi ? Parce que les tiers-lieux ne sont rien sans les act.eurs.rices qui les entourent (habitants.es, élus.es, commerçants.es, etc.) et sans la convivialité qui les lie. Ainsi avons-nous imaginé cette soirée comme une manière de faire comprendre tout en faisant bombance. Autour d’un verre, les langues se délient, les contacts s’échangent. Autour d’un repas, les expériences s’emmêlent et les projets se tissent. Le premier tiers-lieu selon Ray Oldenburg qui a théorisé le concept dès la fin des années 80, c’est d’ailleurs le café, le bar. Et puis, c’est aussi l’occasion d’illustrer le sens de la fête que Nicolas du Pestacle attribue aux personnes qui fréquentent ces lieux et qui leur confère, selon lui, une certaine idée de la société, une envie de vivre pleinement, une inclination à partager des moments heureux.

En introduction, Frédérique Colas, première adjoint au maire de Joigny, a proposé son témoignage de l’arrivée et de l’action de collectifs constitués en tiers-lieux sur la commune. Bien que ces initiatives soient généralement mouvantes, rendant difficiles toutes formes de projections, Madame Colas a néanmoins qualifié les tiers-lieux de chances pour les territoires. Un témoignage conforté et illustré par la conférence de Nicolas du Pestacle mais aussi par les pastilles de récits disséminées ici et là par certains participants. La soirée s’est ensuite poursuivie par une dégustation des délicieuses préparations réalisées par les bénévoles de la Caserne Bascule puis par un concert de Sigma. Merci à la Caserne Bascule pour les repas et la décoration, à SCANI pour l’accueil, aux partenaires de l’événement pour l’organisation de cette expérience et enfin aux musicien.es qui ont réchauffé nos cœurs et nos corps !

Synthèse des questions et échanges

  • La question du bénévolat. Quel est le temps moyen investi par les bénévoles dans un tiers-lieu ? Evidemment, l’investissement des bénévoles est très disparate selon les situations. Il est a priori plus élevé dans le cas d’un collectif qui serait entièrement bénévole (c’est le cas de la Caserne Bascule notamment) que dans le cas d’un collectif qui emploierait des salariés. Il varie aussi en fonction des rôles et des engagements de chacun. Ainsi, en tant que l’un des concierges ou géographes de la CasBa, Louis précise y allouer plus d’un mi-temps. Dans tous les cas, sans bénévole il n’y pas de tiers-lieu. Ou alors, c’est autre chose.
  • La question de l’engagement. Est-ce que les tiers-lieux, en comparaison des associations « classiques » sont une nouvelle forme d’engagement bénévole ? Il est rappelé pour commencer qu’environ 2/3 des tiers-lieux sont organisés en association en France. Néanmoins, dans les tiers-lieux, les personnes sont parties prenantes des décisions. Ce sont des espaces du faire. Des lieux d’expérimentation et d’apprentissage.
  • L’adhésion des élus. Vous avez une astuce pour faire adhérer les élus à des projets de tiers-lieux ? Inviter systématiquement Frédérique Colas à témoigner… ou organiser des voyages de tiers-lieu dédiés aux élu.es et où ils peuvent rencontrer leurs pairs.
  • Le bien-être. Nicolas précisait qu’il était difficile d’évaluer la « réussite » d’un tiers-lieu à partir du moment où ces collectifs se distinguent d’autres types d’organisation dans le sens où elle relève davantage de notions relevant du bien-être ou de l’adhésion des citoyen.es que des sur des considérations d’ordre financier. Et cela semble résonner avec l’expérience de la CasBa où le sourire et la joie sont les piliers qui permettent au collectif de ne pas être se retrouver dans une zone de mal-être. 
  • Tiers-lieu : une auberge espagnole ? Est-ce qu’on peut tout mettre dans un tiers-lieu ? Est-ce qu’il ne faut pas cadrer le fonctionnement autour d’une ou plusieurs activités qui répondent aux besoins du territoire ? Effectivement, qu’ils soient initiés par un collectif ou une collectivité, les tiers-lieux sont souvent organisés autour d’une ou deux activités principales parfois marchandes. Et, c’est depuis ces activités que d’autres s’y accolent et que la toile se tisse. Dans tous les cas, ce qu’il faut bien comprendre, c’est qu’un tiers-lieu n’est pas un lieu de services mais bien un lieu de pratiques. Et toutes les pratiques sont imaginables dans un tiers-lieu.
  • Tiers-lieux et politique. Les tiers-lieux sont-ils des espaces antilibéraux et anticapitalistes ? Ce serait erroné de ne voir les tiers-lieux que dans ces lunettes-là. Le mouvement est extrêmement divers, présentant parfois des dynamiques et des imaginaires qui semblent quasi-opposées. Néanmoins, il est vrai que ces collectifs sont animés par une volonté de travailler et de faire autrement. Mais sans forcément être contre quelque-chose.
  • Les tiers-lieux, porte d’entrée. Comment attirer de nouvelles personnes dans le collectif ? Une participante souhaite souligner le besoin des lieux de rester ouverts à tous et de ne jamais être dans l’entre-soi. Elle évoque ainsi l’idée qu’ils ont eu dans son lieu de mettre en place un point relais colis pour faire bénéficier les acteurs d’un nouveau service et ainsi faire découvrir le lieu à des personnes qui ne venaient pas jusqu’alors.
  • Les tiers-lieux en dehors de la France. Comment le concept des tiers-lieux existe-t-il en dehors de la France ? Il est vrai les pays francophones se sont particulièrement saisis d’un concept, au départ étayé dans la littérature anglo-saxonne. Un colloque, organisé en mai à la Friche la Belle de Mai était notamment consacré aux modes de coopération entre l’Afrique et la France. Plusieurs mouvements similaires en Italie et en Espagne sont évoqués par les participants.

Témoignages

« Cherchant à valoriser un local municipal, j’étais venu à la peche aux informations. J’ai trouvé un climat convivial et une bonne introduction au concept. Il me reste encore bien des questions pratiques mais je suis partie plus riche que je ne suis venue, notamment avec des ouvertures dans ma réflexion. » Hélène

Les notes de Lelio Lemoine

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